Location-gérance
Le contrat de location-gérance, également nommé dans la pratique "gérance libre", permet au propriétaire d'un fonds de commerce, ou d'un établissement artisanal de concéder à une personne, le locataire-gérant, le droit d'exploiter librement ce fonds à ses risques et périls, moyennant le paiement d'une redevance.Intérêt
Pour le propriétaire du fonds : la location-gérance lui permet de conserver la propriété de son fonds, d'en maintenir l'exploitation et de s'assurer un revenu grâce à la perception des redevances.
Pour le locataire-gérant : cette formule lui permet d'être "à son compte" sans avoir à investir immédiatement dans l'achat des éléments parfois onéreux d'un fonds (clientèle, droit au bail, brevet, matériels, licences, etc.). Elle lui permet également d'apprécier la viabilité de l'entreprise qu'il envisage, le cas échéant, de reprendre.
Conditions
- Pour le propriétaire du fonds
- Il peut mettre en location gérance son fonds de commerce à tout moment
- Il doit demander l'autorisation expresse du propriétaire des locaux s'il est titulaire d'un bail commercial imposant une exploitation personnelle du fonds dans les locaux loués.
- Pour le locataire-gérant
- Avoir la capacité d'exercer le commerce.
- Etre immatriculé au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers.
- S'engager à exploiter le fonds selon sa destination, c'est-à-dire sans changer l'activité.
Caractéristiques du contrat
- Publicité du contrat
Un avis doit être publié dans les 15 jours de la date de signature du contrat de location-gérance dans un journal d'annonces légales.
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- Durée du contrat et conditions de résiliation
- Durée déterminée ou indéterminée.
Généralement : un an renouvelable par tacite reconduction.
- Résiliation
Si le contrat est à durée déterminée, la résiliation ne peut intervenir que d'un commun accord dans les conditions prévues par le contrat.
Si le contrat est à durée indéterminée, la résiliation peut se faire unilatéralement sur congé donné par l'une des 2 parties.
- Redevance
- Son montant est fixé librement par les parties et peut être révisable. Il peut être fixe ou proportionnel au chiffre d'affaires ou au bénéfice.
- Les redevances peuvent être versées mensuellement ou trimestriellement et sont soumises à la TVA au taux normal de 20 %.
- Fiscalement,
Pour le bailleur :
- La mise en location-gérance n'entraîne pas l'imposition immédiate des plus values et il n'est pas procédé à l'imposition immédiate des bénéfices réalisés jusqu'au jour de la location gérance.
- Les redevances sont des bénéfices d'exploitation imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Mais cette activité ne présentant pas un caractère professionnel, les déficits éventuels ne peuvent être imputés sur son revenu global.
Pour le locataire-gérant, ces redevances représentent des charges déductibles de son bénéfice imposable.
A noter : les redevances sont soumises à cotisations sociales, à la CSG et à la CRDS, lorsqu'elles sont perçues par un bailleur qui exerce une activité dans le fonds loué.
Cette disposition a pour effet de pénaliser le montage financier consistant à confier un fonds de commerce en location-gérance à une société constituée par l'exploitant lui-même. Ce montage permet à l'exploitant de percevoir des loyers, et non des rémunérations soumises à cotisations sociales.
- Obligations réciproques
Obligations à la charge du bailleur (loueur)
- L'obligation de délivrance du fonds consiste à remettre au locataire tous les éléments composant le fonds, et notamment à lui donner un fonds répondant aux normes d'hygiène et de sécurité, exploitable dans de bonnes conditions et lui permettant une "jouissance paisible".
Une exception est faite quand le locataire a accepté expressément le fonds dans l'état de conformité (ou de non-conformité) où il se trouve.
A noter : un arrêt de la Cour de Cassation du 13 juillet 2010 (n°09-69.170) illustre ces obligations : le propriétaire d'un restaurant qu'il avait mis en location-gérance a été sanctionné (dommages-intérêts pour couvrir les investissements et le préjudice financier dû à la fermeture temporaire du restaurant) pour n'avoir pas fait faire les travaux de mise aux normes, malgré un avis défavorable à l'ouverture au public émis par la commission de sécurité et pour n'avoir pas non plus informé son locataire-gérant de cette non-conformité à la signature du contrat.
- Le locataire bénéficie de 3 garanties légales de droit commun (hors contrat) vis-à-vis du bailleur :
. la garantie des vices cachés,
. la garantie d'éviction qui le garantit contre les troubles de droit provenant de lui-même ou d'un tiers,
. la garantie du fait personnel qui le préserve d'un rétablissement direct ou par personne interposée de la part du bailleur, qui, en se réinstallant, lui ferait concurrence.
Obligations à la charge du preneur (locataire-gérant)
- Le preneur doit exploiter le fonds conformément à sa destination (il ne peut pas modifier l'activité ni en adjoindre une nouvelle sans l'accord du bailleur), il doit gérer l'affaire de telle sorte que le fonds ne perde pas de valeur. Il doit également exploiter le fonds de commerce "en bon père de famille", notamment en respectant la réglementation de la profession pour ne pas mettre le fonds en danger (fermeture administrative par exemple), ne pas modifier l'enseigne, se conformer au bail commercial, faire les réparations locatives, ne pas détourner la clientèle vers un autre fonds, etc.
- Le preneur est souvent tenu d'entretenir le fonds en état d'être exploité. Il doit donc remplacer le matériel hors d'usage, renouveler les brevets, entretenir les locaux.
- Le contrat contient souvent une clause de non-concurrence limitant le droit de rétablissement du locataire à la fin du contrat.
- En vue de garantir le paiement des redevances, l'exécution des obligations du locataire-gérant et le maintien du fonds à sa valeur de départ, il est d'usage d'exiger un dépôt de garantie qui sera restitué au locataire à la fin du contrat.
A noter : la prudence est d'introduire une clause interdisant toute cession ou sous-location de la location-gérance.
- Fin du contrat
- Le locataire-gérant n'a pas droit au renouvellement automatique de son contrat (il n'acquiert pas la propriété commerciale sur le fonds).
- Le locataire restitue le fonds au bailleur qui n'a pas à lui verser d'indemnité.
- La fin de la location-gérance doit faire l'objet d'une publicité (avis dans un journal d'annonces légales). C'est à compter de cette date que le loueur ne garantira plus les dettes fiscales du locataire.
- Les dettes contractées par le locataire, afférentes à l'exploitation et contractées pendant la gérance sont immédiatement exigibles.
Responsabilités
- Jusqu'à la publication du contrat de location-gérance le bailleur est solidairement responsable avec le locataire-gérant des dettes contractées par celui-ci à l'occasion de l'exploitation du fonds.
- Le bailleur peut également être mis en cause par l'administration fiscale, pour le paiement des impôts directs du locataire liés à l'exploitation du fonds de commerce, même au delà du délai de 6 mois.
- Les contrats de travail attachés au fonds le suivent.
Inconvénients
- Le bailleur reprend le fonds dans l'état où il se trouve à la fin du contrat de location-gérance : il court donc le risque de retrouver un fonds déprécié.
- Une contrainte pour le bailleur : à l'expiration de la location-gérance, les contrats de travail en cours se poursuivent entre le loueur et le personnel, à la condition que l'entreprise ait conservé son identité et que son activité ait été maintenue.
- L'administration fiscale considère qu'il y a cession déguisée, lorsque le contrat de location-gérance est assorti d'une promesse de vente et que le montant de la redevance est imputé sur le prix de vente.
- Le locataire n'est propriétaire de rien en fin de contrat ; même s'il a fait prospérer le fonds, il n'a droit à aucune indemnité.
Précision : des clauses bien rédigées dans le contrat de location-gérance peuvent permettre d'éviter les difficultés éventuelles liées à cette situation. La consultation d'un professionnel du droit est donc vivement conseillée.
Textes de références
Articles L144-1 et suivants du code du commerce