Reprendre l'affaire familiale
La reprise d'une entreprise familiale est une forme de transmission qui favorise souvent la pérennité de l'entreprise. Mais reprendre l'affaire familiale peut également être source de conflits ou signer la fin de l'indépendance de l'entreprise. Découvrez les atouts et les difficultés de ce type de reprise et suivez les conseils de Bpifrance Création !Les atouts de la reprise d'une entreprise familiale
Les entreprises familiales présententde sérieux atouts sur les plans économique, financier, fiscal et social.
1) Sur le plan économique
- Leur gestion est majoritairement prudente et avisée. L'affaire appartenant au patrimoine familial, le dirigeant se doit de ne pas mettre en péril les sources de revenus de la famille.
- L'entreprise familiale offre une meilleure résistance aux crises grâce à sa continuité et à sa vision à long terme qui l'ancrent dans le territoire et assurent sa pérennité.
- Les relations cédant et repreneur étant fondées sur la confiance et la loyauté, le chef d'entreprise est soucieux de laisser à son successeur un outil opérationnel et en bon état. Les investissements nécessaires au développement (ou au maintien) de l'activité de l'entreprise ont souvent été réalisés avant la transmission.
2) Sur le plan financier et fiscal
Le dirigeant actuel de l'entreprise familiale doit se poser la question de la forme retenue pour sa succession : cession ou donation.
De sa décision découlent un certain nombre de conséquences fiscales pour lui, son successeur et ses éventuels autres héritiers.
- Quand il y a cession (fonds de commerce ou titres de société), la vente se fait souvent dans de bonnes conditions au regard de la situation du cédant comme du repreneur. En effet :
--> Le prix de cession est généralement adapté à la situation financière de l'entreprise et aux possibilités de financement du repreneur.
--> Les conditions de financement sont plus souples (notamment grâce au crédit vendeur familial qui peut être accordé).
--> Les droits de mutation liés à la cession du fonds de commerce (à la charge du repreneur) sont calculés après application d'un abattement de 300 000 €, sous réserve que l'acquéreur exploite le fonds pendant au moins 5 ans (article 732 ter du CGI) ;
--> La vente d'une entreprise individuelle ou d’une société de personnes relevant de l’impôt sur le revenu est exonérée des plus-values de cession (mais pas des prélèvements sociaux) si elle s'effectue lorsque le dirigeant fait valoir ses droits à la retraite dans les 2 ans précédant ou suivant la cession (article 151 septies A du CGI) et sous certaines conditions.
En savoir plus sur l'exonération des plus-values professionnelles des PME en cas de départ à la retraite.
--> Lorsque la vente n'est pas réalisée pour cause de retraite, une exonération totale est accordée si la valeur de l'entreprise est inférieure à 300 000 € et partielle si cette valeur est comprise entre 300 000 et 500 000 € (article 238 quindecies du CGI). En savoir plus sur l'exonération des plus-values professionnelles en fonction du prix de cession.
--> Si la vente ne dépasse pas un certain montant de recettes (250 000 € pour les entreprises de ventes, les hôtels, les cafés et les restaurants, 90 000 € pour les entreprises de prestations de services) l'exonération des plus-values professionnelles est totale. L’exonération des plus-values est partielle si le CA moyen HT est inférieur à 350 000 € pour les entreprises de ventes, les hôtels, les cafés et les restaurants et 126 000 € pour les entreprises de prestations de services (article 151 septies du CGI)
En savoir plus sur l'exonération des plus-values professionnelles en fonction du montant recettes
- Quand il y a donation des biens professionnels aux futurs héritiers, de nombreuses dispositions fiscales réduisent les droits de succession dus par ces derniers lors du décès du chef d'entreprise. L'ensemble des allègements fiscaux porte sur les droits de mutation, les plus-values professionnelles et les droits de succession :
--> La donation est exonérée des plus-values professionnelles si l'exploitation est poursuivie pendant 5 ans minimum après la date de la transmission et si elle est transmise dans son intégralité, stock compris (article 41 du CGI).
--> Le pacte "Dutreil" (article 787 B du CGI) permet un abattement de 75 % sur les droits de succession ou de donation sous certaines conditions : engagement collectif de conservation des titres d'une durée minimale de 2 ans puis d'un engagement individuel de conservation des titres de 4 ans minimum. En savoir plus sur : les conditions d'exonération du pacte Dutreil (site Notaires de France).
L'obligation de maintenir l'égalité entre les héritiers peut créer des difficultés financières à l'héritier repreneur en raison du désintéressement à verser aux autres héritiers. L'article 787 B du CGI ouvre la possibilité à ce dernier de racheter l'entreprise et de verser une compensation financière à ses frères et sœurs non repreneurs tout en gardant le bénéfice du pacte "Dutreil" (exonération de 75% des droits de mutation) via la création d'une holding de reprise (LBO).
En savoir plus sur les droits de succession/donation
3) Sur le plan social
- Les entreprises familiales mettent en place des rapports sociaux plus directs et fondés sur la confiance entre ses membres. Les employés plus âgés sont souvent dans l'entreprise depuis sa création et y ont développé des relations de proximité et de loyauté avec le dirigeant.
- Dans le cas des entreprises familiales, un lien étroit existe entre la propriété de l'entreprise et sa gestion, créant une cohérence forte entre ces deux pôles et facilitant la perpétuation des valeurs et des traditions familiales.
- Enfin, l'implantation de ce type d'entreprise dans un territoire assure de manière plus sûre le maintien de l'activité économique du lieu.
Les difficultés liées à la reprise d'une entreprise familiale
Reprendre une entreprise familiale peut toutefois être source de problèmes si la succession n'est pas préparée longtemps à l'avance. Les difficultés rencontrées se situent majoritairement sur le plan psychologique : personnalités du cédant et du repreneur, adaptation à la nouvelle direction par les salariés et les partenaires de l'entreprise, motivation du repreneur, désengagement du cédant, etc.
Il est utile de rappeler que :
- La transmission d'une entreprise est une transmission de pouvoir et de propriété. Certains héritiers ne souhaitent pas exercer le pouvoir mais possèdent une partie du capital. Cette situation peut être source de conflit car les objectifs de chacun peuvent différer : réaliser des investissements dans l'entreprise ou percevoir des dividendes ?
- Le poids de l'héritage familial peut sembler lourd. L'héritier repreneur doit :
- assurer la pérennité de l'affaire familiale, la faire fructifier,
- ne pas réduire à néant le travail de toute une vie, continuer l'œuvre de la génération précédente,
- ne pas décevoir…
- La passation des pouvoirs peut s'avérer difficile. Le repreneur doit s'imposer en tant que "patron" et gagner la confiance des salariés, des clients et des autres partenaires de l'entreprise (fournisseurs, banques, etc.). Les plus anciens peuvent avoir tendance à mettre en doute ses compétences en matière de gestion ou de management surtout s'il décide de modifier les méthodes habituellement pratiquées. Certains repreneurs doivent donc prouver leurs capacités managériales pour prendre les commandes dans de bonnes conditions, en gérant la transition tout en imprimant leur marque.
- Certaines entreprises sont amenées à grandir et à se développer sous l'impulsion de leur dirigeant. La génération suivante a parfois du mal à faire face à son développement, voire à son internationalisation. Certaines entreprises vont devoir renoncer à leur indépendance et ouvrir leur capital à des capitaux extérieurs pour poursuivre leur croissance.
- Le chef d'entreprise fondateur de l'entreprise a développé une organisation du travail dans laquelle il est l'homme-clé. Son activité est souvent orientée vers des décisions à court terme et il montre une certaine tendance à contrôler et dominer : il a peu de temps à consacrer à la formation de son successeur et, très souvent, sa personnalité ne favorise pas l'autonomie. Il n'est pas rare que le cédant ait du mal à "décrocher", à tourner la page et à confier l'entière responsabilité à son ou ses enfants.
Quelques conseils si vous envisagez de reprendre l'entreprise familiale
Posez-vous les questions suivantes avant de vous engager :
1) Vous sentez-vous prêt et savez-vous ce qui vous attend ? Ce sera le cas si vous travaillez déjà dans l'entreprise familiale.
Mais dans le cas contraire, n'hésitez pas à faire un bilan de compétences et à suivre une formation spécifique à la reprise d'entreprise. Essayez par ailleurs de vous familiariser avec l'entreprise et son environnement plusieurs mois avant la reprise effective.
En savoir plus sur : comment préparer un projet de reprise d'entreprise ?
2) L'entente au sein de la famille est-elle bonne ? Les relations existant entre la famille et l'entreprise sont étroites : des relations tendues peuvent être source de conflits et limiter les prises de décisions rationnelles.
3) La transmission a-t-elle été préparée par le dirigeant actuel ? A-t-il commencé à déléguer ses pouvoirs ? A-t-il rassuré les salariés en les tenant régulièrement au courant de l'avancée du projet et en leur expliquant votre stratégie ?
En savoir plus sur : pourquoi le cédant doit-il préparer la transmission de son entreprise ?
4) La réalisation d'un bilan patrimonial a-t-elle été envisagée ? Le choix du mode juridique de reprise (donation, donation partage, vente, apport à une holding) est lourd de conséquence sur le plan fiscal. Il est impératif de consulter longtemps à l'avance notaire et conseillers patrimoniaux et de ne pas hésiter à s'appuyer sur un avocat du droit des affaires.
En savoir plus sur le bilan patrimonial
Infographie : les étapes clés de la reprise d'entreprise
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