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Un quartier rural en transition est né à Lustrac, un hameau de la commune de Trentels, dans le Lot et Garonne (47). Porté par une Société coopérative d'intérêt collectif, ce site pilote de 4 hectares concentre les fonctions essentielles à la revitalisation d'une commune rurale. Fruit de la vision d'un entrepreneur engagé et d'un collectif mobilisé, il illustre comment l'économie sociale et solidaire peut accompagner les transitions.
Habiter durablement, bien s’alimenter, produire son énergie, se déplacer en mobilité partagée, investir localement... c'est tout ce qu'il sera bientôt possible de faire sur les quatre hectares du premier quartier rural en transition de France.
Pensé dès 2013, ce modèle inédit prend forme à Lustrac, sur des terrains en bord du Lot. Il a trouvé son impulsion grâce à Frédéric Bosqué, entrepreneur "humaniste" - comme il se définit lui-même - et un collectif de citoyens, structures locales et collectivités, dont la Région Nouvelle-Aquitaine. Tous partagent une même ambition : expérimenter un nouveau modèle de développement territorial, porté par les valeurs et grands principes de l'économie sociale et solidaire (ESS).
Créer un nouvel écosystème coopératif en milieu rural
“On a compilé tout ce qu’on a appris depuis 10 ans pour faire naître ce quartier rural en transition” explique Frédéric Bosqué en faisant visiter le CERF (Centre d'écoconstruction, de ressources et de formation), un bâtiment flambant neuf, qui accueillera bientôt ses premiers élèves charpentiers en formation.
Après une construction de plusieurs mois démarrée à l'automne 2023 et menée notamment par un "chantier Formation qualification Nouvelle Chance" de 12 stagiaires, le centre est emblématique du nouveau lieu de vie qu'est le quartier rural en transition de Lustrac.
"Il est bâti dans une cohérence écologique et sociale", explique Frédéric Bosqué. Avec des matériaux biosourcés, géosourcés, ou recyclés - terre, paille, chanvre... - il a nécessité le travail de concepteurs, artisans, bureaux d'étude et fournisseurs locaux. Dans son utilisation quotidienne, il optimise les ressources, l'énergie, les déchets...
Autour du CERF, le nouveau quartier s'organise progressivement. Il rassemble ainsi, à proximité des habitations autonomes, plusieurs activités qui en font un lieu de vie coopératif :
- un jardin partagé et à terme des espaces de transformation et distribution alimentaires,
- des formations et activités de sensibilisation et des formations aux transitions,
- la production d'énergie avec l'installation de panneaux solaires et un partenariat avec le fournisseur d'électricité renouvelable Enercoop,
- un parc de voitures électriques en autopartage,
- l'utilisation de la monnaie citoyenne du Lot-et-Garonne, l’Abeille, pour renforcer l’impact économique local du projet...
De l’idée au premier quartier rural : un collectif mobilisé
Des bonnes pratiques pour dynamiser les territoires
En 2013, Frédéric Bosqué réfléchit à une économie centrée sur l'humain et comprend le rôle crucial des territoires ruraux dans la transition écologique. "J'ai alors décidé de partir à vélo faire un tour de France à la rencontre de tous ces gens qui avaient quitté la ville pour habiter à la campagne", raconte l'entrepreneur.
Autour de lui, se mobilise un collectif à la recherche de bonnes pratiques et les premiers volontaires créent l’association Tera. Certains s'installent à Masquières pour reprendre une petite ferme en permaculture, puis à Tournon d'Agenais, le siège actuel de l'association, où une épicerie de producteurs et une brasserie sont notamment créées, avec un ensemble d’activités au service du territoire.
En 2020, l'équipe franchit une nouvelle étape. "On a voulu mettre en pratique tout ce qu’on avait appris avec l'association Tera.", explique Frédéric Boqué. Le projet du premier quartier rural en transition démarre donc à Lustrac. Sur un terrain racheté à la commune de Trentels, l'association créée une Société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) - dont la mairie, notamment, est sociétaire.
Un modèle qui a du sens, à essaimer ailleurs en France
Entreprises, citoyens, associations et collectivités coopèrent ainsi pour créer une dynamique qui garantit des revenus et un lieu de vie à chacun.
Aujourd’hui, la SCIC de Lustrac rassemble 25 personnes et une dizaine de salariés. « Je voulais trouver un véritable effet levier pour changer nos activités et revitaliser les communes rurales. Aujourd’hui, je sens que mon métier a retrouvé du sens », confie Frédéric Bosqué.
L'objectif futur du collectif est de mettre à disposition d'autres territoires, partout en France, les résultats de leurs actions. "Nous voulons essaimer ces quartiers ruraux en transition pour revitaliser la ruralité." L’idée est d’y accueillir et d’y accompagner les citadins des grandes villes qui veulent vivre, entreprendre et investir en milieu rural.
Alimentation, construction durable, formation, services à la personne, santé… L’économie sociale et solidaire (ESS) change la façon d’entreprendre dans de nombreux secteurs. Tournée vers l’humain et respectueuse de l’environnement, l’ESS transforme les territoires en portant des valeurs de coopération, de solidarité et de création de lien social. Avec 256 700 salariés et 20 651 établissements employeurs, la Nouvelle-Aquitaine est la 3ème Région française pour ses emplois dans l’ESS.
La Région accompagne l'association Tera et le projet de Lustrac depuis plusieurs années :
- 2016 : prix de l’innovation sociale
- 2022 : aide de 75000 euros pour la création de l'entreprise en SCIC
- 2024 : via le Fonds Feder, financement de 300 000 euros pour la création du centre d’écoconstruction...
Ce soutien s'inscrit dans la feuille de route régionale pour les transitions, Néo Terra.