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Encyclopédie de l'entreprise
Développer l'activité de son entreprise

Transformation d'une entreprise individuelle en société

La constitution d'une société dans le but d'accueillir les actifs d'une entreprise individuelle existante (appelée communément "mise en société"), et ayant atteint un certain développement, nécessite des réflexions et une prise en compte des motivations du chef d'entreprise.

Les motivations habituelles

  • Sur le plan juridique

L'entrepreneur individuel est propriétaire du fonds de commerce ou du fonds artisanal qu'il exploite, c'est-à-dire d'un ensemble d'éléments incorporels et corporels assez divers : clientèle, droit au bail, marque, brevet, licence, matériel, stock, etc. Ils font partie de son patrimoine personnel. S'il est responsable indéfiniment de ses engagements sur l'ensemble de ses biens, sa résidence principale est inssaisissable de droit et il peut protéger ses autres biens fonciers bâtis et non bâtis non affectés à un usage professionnel en effectuant devant notaire une déclaration d'insaisissabilité. Mais, sauf option pour le régime de l'EIRL, ses autres biens personnels resteront engagés.

Quant à elle, la société constitue une entité distincte des associés qui sont détenteurs de son capital. Elle est dotée d'un patrimoine propre. Les dettes de la SARL par exemple ne peuvent pas faire l'objet de poursuites sur le patrimoine personnel de ses associés ou dirigeant (sauf pour ce dernier, en cas de faute de gestion ayant un lien de causalité direct avec le passif de l'entreprise).
Dans la pratique, ce principe de limitation de responsabilité pécuniaire est atténué : dans la plupart des cas, le banquier exige un engagement personnel du dirigeant de la société pour accorder, par exemple, un prêt à une SARL aux capitaux faibles.

  • Sur le plan économique

Pour développer son entreprise individuelle, le chef d'entreprise doit augmenter son investissement financier personnel ou faire appel au crédit bancaire.

En revanche, la société permet de compléter les emprunts en faisant appel à des capitaux privés ou à des investisseurs. Ce cadre favorise également les rapprochements et les alliances entre les entreprises par la création de filiales communes ou de prises de participation.

  • Sur le plan fiscal

L'entreprise individuelle n'a pas d'autonomie fiscale (à l'exception du régime de l'EIRL qui peut opter pour l'impôt sur les sociétés sous certaines conditions). Les bénéfices industriels et commerciaux qu'elle réalise s'ajoutent aux autres revenus de l'exploitant et sont soumis à l'impôt sur le revenu. Il est à noter que même s'il ne prélève pas les bénéfices afin de conserver sa trésorerie ou de financer un investissement professionnel, le chef d'une entreprise individuelle doit payer l'impôt sur ce revenu sur ces bénéfices.
La progressivité de l'impôt sur le revenu fait donc obstacle à l'autofinancement de l'entreprise individuelle.

  • Sur le plan social

La base de calcul des cotisations sociales de l'entrepreneur individuel correspond au bénéfice imposable de l'entreprise, y compris la partie éventuellement réinvestie dans l'entreprise et avant application de certains allégements fiscaux et de la déduction des cotisations sociales complémentaires facultatives.
Dans le régime de l'EIRL, et en cas d'option pour l'impôt sur les sociétés, la base de calcul des cotisations sociales est limitée à la rémunération que l'EIRL s'attribue, qui est une charge déductible du bénéfice imposable et à laquelle s'ajoute dans certains cas, une part des dividendes versés.
En choisissant de créer une SARL soumise à l'IS, l'entrepreneur ne cotise que sur la rémunération qui lui est allouée. Mais, tout comme l'EIRL, depuis le 1er janvier 2013, la part des dividendes perçus par le gérant (et son conjoint, son partenaire pacsé, ses enfants mineurs) est soumise à cotisations sociales pour la fraction supérieure à 10 % du capital social, des primes d'émission et des sommes versées en compte courant (loi de financement de la sécurité sociale du 17 décembre 2012).

  • Sur le plan de la transmission

En cas de décès de l'exploitant, l'entreprise individuelle risque d'être paralysée. Elle revient en indivision aux héritiers qui doivent à l'unanimité donner mandat à l'un d'entre eux pour gérer l'affaire familiale.

- La société est un instrument mieux adapté pour la transmission aux enfants ou à des tiers et elle permet les partages ou montages afin d'assurer la pérennité de l'entreprise.

Comment prendre la décision de transformer l'entreprise individuelle en société ?

L'entrepreneur individuel doit analyser sa situation personnelle, son patrimoine, son environnement familial :

- la capacité bénéficiaire de son entreprise le conduit-elle à payer un impôt sur le revenu dans les tranches élevées ?
- quelle est sa situation au regard des régimes sociaux ?
- les cotisations versées (complémentaires et facultatives) sont-elles déductibles ?

Il faut également envisager le statut du dirigeant dans la future société : gérant, président-directeur général.
En fait, sur le plan social et juridique, le dirigeant doit se poser les mêmes questions qu'à la création de son entreprise.

Ensuite, l'exploitant doit se livrer à une étude chiffrée en tenant compte notamment de la rémunération envisagée, du statut du dirigeant, des charges sociales et fiscales qui seront à payer par la société et par lui-même, mais également du coût de l'opération de transformation en société.

L'entrepreneur individuel assisté d'un conseil compétent et d'un expert-comptable pourra projeter les données de cette étude dans un futur cadre sociétaire.

Mécanismes

  • La première solution consiste pour l'entrepreneur à créer une société et apporter au capital de celle-ci les actifs de l'entreprise individuelle. Il s'agit d'un apport en nature.

On distingue deux sortes d'apports : les apports purs et simples qui sont effectués en échange de titres de la société (parts sociales ou actions) et les apports à titre onéreux rémunérés soit par des obligations ou des espèces, soit par la prise en charge du passif de l'entreprise individuelle par la future société.
La répartition du capital dans cette nouvelle société n'est pas libre, car la valeur de l'apport en nature influe directement sur le montant total du capital social et sur le pourcentage du capital détenu par l'apporteur.
L'intervention d'un commissaire aux apports pour leur évaluation peut être obligatoire, selon la valeur de ces apports et le pourcentage de capital qu'ils représentent.

  • La deuxième solution consiste pour l'entrepreneur à vendre son fonds de commerce ou fonds artisanal à une société qu'il crée simultanément. Dans ce cas, la répartition du capital de cette nouvelle société est libre. Le dirigeant peut ainsi plus facilement prendre la majorité du capital social s'il le souhaite.

Ce mécanisme présente deux avantages :
- la société nouvellement créée emprunte pour acheter le fonds de commerce et déduit les intérêts de cet emprunt de son résultat imposable ;
- l'entrepreneur perçoit tout de suite le produit de la vente de son fonds de commerce.
L'évaluation du fonds de commerce peut être faite par le cédant lui-même.
L'intervention d'un avocat ou d'un notaire est en revanche recommandée pour la rédaction de l'acte de vente.

La vente peut se faire avant l'immatriculation de la société ou bien après celle-ci. Si elle a lieu avant, l'acte de vente sera signé par le futur dirigeant "agissant pour le compte de la société en formation" et il sera repris a posteriori au nom de la personne morale. Si la vente se fait après son immatriculation, la société est d'abord immatriculée "sans activité", puis une formalité administrative sera nécessaire pour inscrire l'activité exercée dans le fonds de commerce acheté. Cela occasionne donc un coût supplémentaire.

Coût fiscal

  • Apport du fonds dans le capital d'une société à créer (1ère solution)

- Taxation des bénéfices de l'entreprise individuelle

L'apport de l'entreprise individuelle à une société équivaut à la cessation de son activité et entraîne ainsi en principe la taxation des bénéfices qu'elle a réalisés.

- Apports et droits d'enregistrement

 - Les apports purs et simples  ou les apports à titre onéreux au capital d'une société, d'un fonds de commerce, d'immeubles (s'ils sont apportés avec les actifs affectés à l'exercice de l'activité professionnelle), d'une clientèle ou d'un droit au bail, faits par une personne physique relevant de l'impôt sur le revenu, sont exonérés de droits d'enregistrement, à condition que l'apporteur s'engage à conserver pendant 3 ans les titres reçus en échange de l'apport.
 - Les apports purs et simples d'immeubles achevés depuis moins de 5 ans et les terrains à bâtir sont soumis au droit d'enregistrement fixe.
- Les apports à titre onéreux d'immeubles sont soumis à un droit proportionnel de 5 %, sans engagement particulier.
- Les marchandises neuves apportées en même temps que le fonds de commerce sont soumises à la TVA.

- Apports et taxation des plus-values

L'apport de l'entreprise individuelle dans le capital de la société est fiscalement assimilée à une cession, ce qui entraîne l'imposition des plus-values (de façon schématique, la plus-value correspond à la différence entre la valeur d'apport du bien corporel ou incorporel et la valeur d'achat à l'origine. Si le bien apporté a été créé par l'entrepreneur individuel, comme sa clientèle, la plus-value correspond à la valeur d'apport).
Mais, il existe un régime de sursis d'imposition des plus-values, prévu par
l'article 151 octies du CGI, qui peut s'appliquer. Il fonctionne de la manière suivante :
- la plus-value sur les éléments amortissables n'est pas imposée au nom de l'entrepreneur individuel, mais elle est réintégrée dans le résultat imposable de la société nouvelle, sur une période maximum de 5 ans (ou bien, elle est imposée immédiatement au taux réduit des plus-values à long terme),
- la plus-value sur les éléments non amortissables (notamment les éléments incorporels) est reportée dans le temps, jusqu'à ce que les parts de capital ou actions reçues en contrepartie de cet apport soient cédées, rachetées ou annulées.

Les conditions à remplir, pour bénéficier de ce report d'imposition, sont les suivantes :

- l'apporteur est une personne physique, exerçant une activité commerciale, artisanale, libérale,
- l'apport doit porter sur une branche complète d'activité ou sur une entreprise individuelle,
- l'apport peut être effectué en faveur de toute société nouvelle, quelle que soit sa forme juridique, à condition qu'elle soit soumise à un régime réel d'imposition,

- la société bénéficiaire de l'apport doit inscrire les stocks à l'actif de son bilan à la valeur comptable pour laquelle ils figurent au dernier bilan de l'entreprise apporteuse,
- en cas de transmission, à titre gratuit, des droits sociaux rémunérant l'apport ou de la nue-propriété de ces titres, le report d'imposition est maintenu à condition que le bénéficiaire s'engage à payer la plus-value s'il cède ses titres ou si la société vend le bien apporté.

 

A noter : lorsque l'entrepreneur individuel a apporté son entreprise à une société et qu'il a bénéficié du report de l'imposition des plus-values d'apport sur éléments non amortissables, il peut imputer sur ces plus-values les moins-values qu'il constate lors de la cession des titres correspondant à cet apport (réponse ministérielle n° 13533 - Journal officiel du 6 juillet 1998 p. 3757).

- La cession des parts sociales est soumise à un droit d'enregistrement de 3%.
Les acquéreurs de parts sociales peuvent bénéficier d'un abattement sur le montant de ces droits d'enregistrement. Cet abattement est égal, pour chaque part sociale, au rapport entre 23 000 euros et le nombre total de parts sociales de la société.


- Les cessions d'actions, qu'il y ait ou non un acte écrit, sont soumises aux droits d'enregistrement au taux de 0,1 % à la charge de l'acquéreur. (ce taux est de 5 % si la moitié de l'actif de la société est constituée d'immeubles).

  • Cession du fonds à une société nouvellement créée (2ème solution)

-A la charge de la société repreneur

-  Paiement des droits d'enregistrement
Pour la fraction du prix  < à 23 000 euros : 0 %
Pour la fraction du prix comprise entre 23 000 euros et 200 000 euros : 3 %
Pour la fraction du prix  > à 200 000 euros : 5 %
Ces droits sont fiscalement déductibles pour la société repreneur.
Ils peuvent être légèrement réduits lorsque l'acquisition se situe dans certaines zones prioritaires de développement, sous réserve que l'acquéreur s'engage à maintenir l'exploitation pendant 5 ans. 

-  La TVA sur le stock de marchandises : le stock est vendu séparément par le cédant à la société repreneur comme s'il s'agissait d'un acte de commerce, mais, l'opération est dispensée de TVA.

A la charge du cédant

- Imposition immédiate des bénéfices.
- Imposition au titre des plus-values professionnelles (exonération sous conditions).
- Reversement au service des impôts d'une quote-part de la TVA déduite sur les matériels acquis depuis moins de 4 ans.

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