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Cosylva défend le douglas local

Temps de lecture 6 minutes

Depuis plus de 30 ans, Cosylva fabrique des charpentes en bois lamellé-collé. Elle est devenue l’un des leaders européens de la fabrication de lamellé en douglas et a fait de l’utilisation de ce bois local son cheval de bataille. Aujourd’hui, elle investit massivement pour mieux le valoriser.

Publié le Mercredi 28 mars 2018
  • #Bois et forêt
  • #Développement d'entreprise
  • #Entreprise

Douglas ou épicéa

A la sortie de Bourganeuf (Creuse), les hauteurs de la vallée du Taurion abritent le siège de Cosylva. Hangar immense en structure bois pour les découpes et les assemblages, sites de stockage tout autour, camions qui chargent et déchargent. Dans l’atelier principal, autour des machines, les poutres attendent leur livraison. Cosylva est spécialiste du bois lamellé-collé qu’elle livre dans toute la France et parfois à l’étranger. « Cela reste marginal » reconnait Julien Bouthillon, le président directeur de Cosylva. « Excepté pour des projets exceptionnels, les poutres sont destinées au marché national car les coûts et les difficultés de transport sont vite dissuasifs. » Les poutres de Cosylva se retrouvent néanmoins aux quatre coins de la planète pour des commandes spéciales qui font appel aux savoir-faire de la société.

Sur le site de stockage, le douglas, de teinte rouge, se distingue nettement de l’épicéa blond, les deux essences utilisées en lamellé-collé. L’épicéa domine largement. Pour Julien Bouthillon, ce devrait être exactement l’inverse. L’utilisation du douglas, c’est le cheval de bataille de Cosylva depuis plus de 20 ans. « En construction bois, il n’y a rien que le douglas ne permette de faire. Ses propriétés mécaniques sont aussi bonnes que celles de l’épicéa. Le douglas possède même un avantage : il ne se dégrade pas en extérieur, ce qui n’est pas le cas de l’épicéa » explique Julien Bouthillon. Pourtant, les donneurs d’ordre, publics comme privés, restent frileux devant son utilisation. Une question de culture. Le douglas est un bois récent, planté majoritairement après-guerre. Le massif est aujourd’hui à maturité mais son utilisation est récente dans la construction. Par méconnaissance, on l’utilise dans la fabrication de palettes. « Mon père avait fait du douglas un axe de développement de l’entreprise. » Julien Bouthillon qui a repris l’entreprise familiale en 2005 continue à y croire même si « la proportion de douglas que nous utilisons aujourd’hui n’a pas évolué ces dix dernières années. » Pour le PDG, c’est avant tout « une affaire de conviction et un choix. »

Bois du Nord contre ressource locale

Aujourd’hui, l’approvisionnement du secteur est intégralement dépendant des bois du Nord de l’Europe. « Alors que nous possédons une ressource locale d’excellente qualité qui nécessite d’être valorisée de la meilleure façon. » Une récente étude menée par le cabinet Biom a déterminé que lorsque Cosylva réalise une charpente en douglas, 88 % de son chiffre d'affaires est redistribué en France, contre seulement 34 % s'il s'agit de bois d'importation. Outre les avantages écologiques d’un circuit court, « ce chiffre devrait donner à réfléchir à tous ceux qui parlent de relocalisation. »

L’importance du massif de douglas est comparable à celle du pin des landes. Alors qu’il était légèrement plus cher que l’épicéa, la hausse des prix de ce dernier va le rendre concurrentiel. Julien Bouthillon prévoit même que les prix des bois nordiques, convoités par les acheteurs Chinois et Nord-Américains, s’envolent dans les prochaines années. C’est pour se préparer à ce changement que l’entreprise a décidé d’investir dans de nouveaux équipements.

Cosylva Julien Bouthillon
Cosylva Julien Bouthillon
Cosylva vue générale atelier
Cosylva vue générale atelier
Cosylva machine
Cosylva machine

Investir pour répondre à la demande

« Pour nous, la crise a duré jusqu’à début 2017. Depuis un an, on a retrouvé un peu d’activité régulière. Mais cela fait 10 ans que nous n’avons pas pu investir. ». L’entreprise dépend à 100% de ses clients charpentiers. Comme tout le secteur de la construction, elle a été touchée de plein fouet par la crise de 2008. « On a réussi à conserver le volume d’activité au dépend de la rentabilité mais aujourd’hui, nous sortons enfin du marasme. » Le PDG est optimiste. « C’est parce que nous prévoyons une explosion de la demande que nous investissons aujourd’hui. »

Julien Bouthillon se donne trois objectifs : améliorer les process de fabrication (recherche de rentabilité), essayer d’être plus efficace dans l’utilisation du douglas et surtout, se mettre en capacité de répondre aux appels d’offres pour les immeubles de grandes hauteur en bois. A la suite d’un appel à manifestation d’intérêt lancé par le ministère de l’agriculture, trente-six projets devraient voir le jour. Ces immeubles en bois feront 11 étages en moyenne, 18 pour le plus élevé à Bordeaux.

Dans les trois années à venir, l’entreprise prévoir donc la construction d'un nouveau bâtiment de stockage, la réorganisation de son second site de production pour le spécialiser dans la première transformation du douglas. « Le but est de proposer systématiquement une réponse en bois français. On installe une ligne de tri des bois pour pouvoir proposer 3 qualités de douglas contre 2 aujourd’hui car cela correspond mieux à la ressource. Le douglas est un bois très hétérogène. En le séparant en 3 qualités distinctes, nous répondrons mieux aux attentes des clients. » Une ligne de tri automatique qui complètera l’installation de sciage avec les séchoirs. Cette ligne permettra à la fois de traiter des volumes importants de bois et d'améliorer les conditions de travail des opérateurs qui, aujourd’hui, réalisent ce travail manuellement. Enfin, deux centres de taille à commande numérique permettront d’usiner de très grosses sections, celles-là même que requièrent les immeubles de grandes hauteurs.

« On s’est donné pour objectif de faire un ou deux de ces immeubles, ce qui correspond à notre part de marché. Encore faut-il être capable de les faire ! » plaisante Julien Bouthillon. Cosylva espère bien que les appels d’offres feront la part belle au douglas. « Les cahiers des charges techniques demandent encore souvent des bois d'importation. C’est dommage. Si j’avais un message à faire passer, ce serait que les pouvoirs publics prennent enfin la mesure de l’intérêt à utiliser le bois français. » Dont acte.

L’engagement régional

Lors de la commission permanente du 5 février 2018, Cosylva a reçu un aide Région de 234 000 euros sur un montant global d’investissement de 1 170 000 euros.

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